S’il est un artiste incontournable en Scandinavie, Bruno Liljefors est assez méconnu en France. La magnifique exposition qui lui est consacrée au Petit Palais permet donc au public de découvrir cet artiste qui a consacré la majeure partie de sa vie à nous présenter sa vision émerveillée de la nature et tout particulièrement de la faune et de la flore en Suède. Son travail et son engagement total pour la biodiversité sont à la fois pionniers et actuels.
Grâce à de nombreux prêts de musées suédois et de collectionneurs privés, l’exposition met en lumière l’oeuvre de Liljefors.
Né à Uppsala en 1860, son talent de dessinateur est vite reconnu et il entre à l’Académie des Beaux-Arts de Stockholm à 19 ans. Mais Liljefors délaisse rapidement le classicisme pour la peinture en plein air. Sur les conseils de son ami Anders Zorn, il quitte la Suède pour la France, et s’installe à Grez sur Loing, repaire des peintres de plein air, des naturalistes et des impressionnistes. C’est ici que Liljefors va développer son talent, au contact de Jules Bastien Lepage figure emblématique du naturalisme.
Carl Larsson, son compatriote et ami, aura également une influence décisive sur l’esthétique japonisante de Liljefors. L’art japonais et notamment les estampes vues lors des expositions universelles inspire l’artiste suédois. Ainsi, la composition de ses oeuvres et le regroupement de plusieurs oeuvres agencées de façon originale dans un seul cadre rappellent les bois gravés japonais qui étaient agencés selon le procédé de l’harimaze.
Imprégné des préceptes naturalistes et impressionnistes, qui se révèlent notamment dans l’oeuvre Soirée d’été, Bruno Liljefors quitte la France pour peindre la nature suédoise.
La peinture de Liljefors offre une vision unique de la faune de son pays. Il faut préciser que l’artiste est aussi gymnaste et acrobate et n’hésite pas à prendre des risques pour obtenir le point de vue désiré pour son oeuvre, grimpant dans les arbres, utilisant poulies et autres mécanisme et pratiquant l’art du camouflage pour observer au plus près la faune environnante. C’est ainsi que le spectateur découvre émerveillé aiglons, bouvreuils, geais, mais aussi renards, lièvres et plus simplement le célèbre Jeppe, le chat de l’artiste maintes fois représenté dans des situations variées. Peintre infatigable, le « prince des animaliers » a aussi installé sa propre ménagerie.
Pour autant, Bruno Liljefors n’est pas uniquement naturaliste et sa peinture, si elle est à la fois didactique et sensibilise le spectateur à la biodiversité, n’a pas vocation à être purement décorative. Sensible aux thèses de Darwin, il n’hésite pas à peindre la vie naturelle sans filtre avec parfois des images déployant toute la cruauté existant dans la vie animale, et avec une précision quasi-scientifique.
L’art de Liljefors va connaître une évolution remarquable vers les années 1890. Influencé par le mouvement national romantique suédois, il délaisse le naturalisme pour le symbolisme. Les tableaux de cette période sont empreints de mystère et de poésie. La lumière et l’atmosphère deviennent prépondérants. Son cadre de vie change aussi puisque l’artiste quitte les forêts profondes pour s’installer désormais dans l’archipel de Stockholm et nous offrir de magnifiques couchers de soleil dont les scandinaves ont le secret et qui font rêver les spectateurs.
Alix Guedj
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