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(5) LES REPRÉSENTATIONS DU MONDE DANS LES ARTS - Quatre Captifs ou Quatre Nations Vaincues

Photo du rédacteur: VictoireVictoire

Dernière mise à jour : 3 mai 2022

Quatre captifs dits aussi Quatre Nations Vaincues est une sculpture réalisée par Martin Desjardins entre 1637 et 1694. Elle est actuellement exposée au musée du Louvre, et symbolise la toute-puissance démiurge de la France. Commandée par le vicomte d’Aubusson, duc de La Feuillade, elle est d’abord installée sur la place des Victoires, elle commémore la fin de la guerre de Hollande et la victoire de la France par le traité de Nimègue durant le règne de Louis XIV. Les quatre captifs symbolisent alors les nations vaincues par la France, c’est à dire l’Espagne, l’Empire germanique, la Hollande et le Brandenbourg. De même, chacun exprime un sentiment différent dans l'épreuve de la captivité : la révolte, l'espérance, la résignation ou l'abattement.


Ainsi, l’Espagne est représentée par un éphèbe nu se tournant vivement vers le ciel dans un ultime signe d’espoir. L’artiste joue ici sur le caractère antique de l’allégorie : enchaîné et assis sur son bouclier et son glaive emprunté à l’Antiquité, la torsion dans son corps révèle sa jeunesse d’esprit et sa vivacité. Le courage et la témérité dont il fait preuve, propres au modèle romain de la virtus, est cependant atténué par la vision de la lance brisée placée à cotée de lui, témoignant de sa soumission.




Pour sa part, l’Empire germanique est incarné par un vieillard replié sur lui-même, le dos courbé, las et soumis, abattu et résigné. Penché vers le sol, la face baissée, il semble néanmoins relever ses pupilles vers le spectateur, le toisant d’un regard amer. À ses pieds se tient un carquois, abandonné en guise de soumission.






L’allégorie de la Hollande est présentée sous les traits d’un homme légèrement barbu, aux cheveux coupés courts, et au regard déterminé et farouche. Révolté, il est prêt à reprendre les rames et à se relever, un genou déjà à terre et les muscles tendus, prêt à se libérer de ses chaines. Les traits hargneux, le visage sombre, il toise le spectateur avec dédain et semble le jauger. De même, la flamme allumée à ses côtés témoigne encore de la rage qui l’habite.



Enfin, le Brandenbourg est dépeint sous les traits d’un homme âgé, non pas abattu, mais résigné. Vêtu d’un habit antique, il rejoint les peuples celtes et gaulois. Penché vers le spectateur, il semble implorer sa pitié. Cependant, sa position est ambiguë : tandis qu’il paraît demander la grâce des vainqueurs, résigné, son poing serré témoigne de sa retenue : il ne veut pas se rendre et semble en conflit avec lui-même.




D’autre part, en dehors de la figure des vaincus, cette sculpture est habillée des trophées guerriers : les casques côtoient les boucliers, les lances sont placées à coté de carquois. Un bouclier retourné semble sceller définitivement le sort des nations éplorées. Des faisceaux, des enseignes, des avirons, une pertuisane et une hallebarde ont également été sculptées, témoignant de la volonté d’un retour à l’Antiquité de l’artiste.


Entre classicisme et baroque, cette sculpture grandiose témoigne bien d’une certaine représentation du monde qui sert ici la France. En effet, cette vision de quatre grandes nations soumises à la France contre leur gré, allant jusqu’à implorer sa grâce, permettent d’affirmer la puissance militaire française. Cependant, à travers cette sculpture, c’est aussi la puissance artistique de la France qui est célébrée : par un travail virtuose, le sculpteur est alors parvenu à nous montrer des visages ambigus, partagés entre désespoir et rage et espoir. C’est donc une vision du monde particulièrement sombre et ambiguë qui se dégage de cette oeuvre. Véritable triomphe offert à Louis XIV par l’un de ses plus habiles courtisans, ce monument est un symbole d’humiliation des quatre puissances ennemies et témoigne bien de l’absolutisme régalien, imposant sa domination à toute l’Europe.

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