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L’horizon sans fin - De la Renaissance à nos jours

  • Photo du rédacteur: Victoire
    Victoire
  • il y a 1 jour
  • 3 min de lecture

📍Du 10 mai au 5 octobre 2025 - Musée des Beaux-Arts de Caen


Comment représenter ce qui se dissipe, se dissout, se volatilise à mesure qu’on l’approche et qu’on pense enfin l’effleurer ? L’horizon nous semble à portée de main, et pourtant, il continue de nous échapper. Pur phénomène visuel, l’horizon n’existe que par rapport

à celui qui le regarde, et se déplace à mesure qu’on l’approche.


C’est pourtant la lourde tache que se sont donnés les peintres et les artistes à toute époque : évoquer ou transcrire ce phénomène fugitive, à la limite de l’espace et du temps qui semble irrémédiablement séparer le ciel et la terre.


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L’exposition retrace d’abord les premières tentatives de perspective, et les représentations linéaires de l’horizon qui en découlent à travers un panel d’oeuvres de choix comme le Mariage de la Vierge du Pérugin. L’horizon est alors considéré de manière scientifique, comme un repère stable, fixe, qui permet de construire la perspective. La perspective atmosphérique (où l’horizon se dissout dans le flou d’un paysage en sfumato) concurrence rapidement la perspective cavalière traditionnelle (dans laquelle l’horizon reste matérialisé par une ligne bien visible divisant ciel et terre).



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Entre autres thèmes, l’exposition soulève également la question de la perception de l’horizon : ses différentes représentations et modulations permet en effet d’instiguer différentes atmosphères. Ainsi, un horizon haut donne un effet d’étouffement et d’inéluctabilité, comme en témoigne L’évasion de Rochefort d'Edouard Manet : une telle représentation accentue le caractère pathétique du sort funeste qui menace les prisonniers du radeau.



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Certaines oeuvres évoquent aussi le caractère menaçant d’un horizon qui s’apparente à un couperet : Tom Nadam dans son huile sur toile La Bouffée (tirée de la série « Incendies ») évoque par ce biais les conséquences dramatiques des catastrophes écologiques contemporaines.



Cependant, l’horizon peut aussi être synonyme d’espoir. Il est alors dépeint comme une lumière évanescente qui va guider celui qui l’observe. Le film Green Line par exemple manifeste cette fascination pour ce moment où les derniers rayons du soleil couchant forment une ligne verte à la surface de l’eau, symbole d’espoir.


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Ainsi, l’horizon est souvent représenté comme ce qui nous rapproche et ce qui nous unit au sein d’un même espace atmosphérique. C’est un spectacle que la nature donne à voir à tout être humain partout sur la surface du globe, et qui continue de fasciner par son caractère sublime, irréel, magnifique. Des peintures de Caspar David Friedrich aux photographies de l’artiste contemporain Youssef Nabil, l’horizon exerce ce même pouvoir d’attraction magnétique sur celui qui l’admire.


Enfin, l’exposition met en lumière ce désir immémoriale de chercher à repousser l’horizon. Cette conquête de l’espace passe par la découverte des tréfonds de l’univers, et s’accompagne dans les oeuvres de la conquête concomitante des médiums artistiques : la mise au point de nouvelles techniques permet désormais d’appréhender par de nouveaux moyens cet horizon infini. C’est le cas de l’oeuvre de Capucine Vever Et il fut accusé par ses contemporains d’impiété et d’arrogance pour avoir franchi les limites permises aux mortels : l’utilisation d’un dispositif de projection vidéo permet de dépasser les limites de la science et de l’art traditionnel.

L’horizon s’étend désormais au-delà du champ du réel grâce aux avancées technologiques et scientifiques, mais reste en tant que tel toujours hors de portée.



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S’il est donc vain de représenter l’horizon tel qu’il se donne à nous, par les moyens figuratifs traditionnels, certains artistes ont choisi le passage par l’abstraction afin de le matérialiser. C’est le cas d’Ólafur Elíasson avec Votre Émergence Privé (Jaune à Bleu) : le paysage que devait clore l’horizon disparait au profit d’aplats de couleur qui se chevauchent et se confondent. L’utilisation du verre coloré laisse apparaître en transparence le mur blanc contre lequel l’oeuvre repose, matérialisant indirectement un horizon qui se situe au-delà de l’oeuvre, mais qu’elle parvient tout de même à exprimer.


Dès lors, l’horizon représente ce mystère que l’homme ne saura jamais percer malgré les progrès des transports et de la communication. Certes, la mondialisation a rétréci l’espace. Elle a fait de la Terre un monde fini dont on connait désormais les limites. Mais elle ne saura enlever ce vertige face à l’immensité d’un monde qu’on ne parvient toujours pas à embrasser, à appréhender d’un seul regard. Si l’univers se déploie désormais devant nos yeux grâce au progrès de la science et de la photographie, il reste transcendant et continue de dépasser les limites de l’entendement humain.


Victoire Gheleyns

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